Penser avant de construire

Pourquoi veut-on toujours aller vite vers la maquette ?

Pensées | le 12 novembre 2025

On veut tous voir vite quelque chose.
Un visuel, une maquette, un résultat tangible.
Mais la vraie valeur d’un site se joue avant ça : dans les échanges, les plans, les idées qui s’affinent.
C’est une phase silencieuse, parfois invisible, mais essentielle.
C’est là que tout prend forme, même si rien n’existe encore.

Avant de créer un site, j’ai besoin de comprendre ce qu’il doit faire.
Pas seulement en surface, mais en profondeur.
Quel rôle joue-t-il pour celui qui le commande ? Quelle place aura-t-il dans sa communication, dans sa prospection, dans sa façon d’exister en ligne ?
Un site, c’est un outil. Et un outil doit répondre à un besoin précis.
Alors je prends le temps de poser les bases, de discuter, de dessiner des structures, des parcours, des intentions.
Ce travail, souvent discret, prépare tout le reste.

Je parle souvent d’arborescence, mais c’est un mot un peu froid pour ce que j’en fais.
Je crée surtout un plan de discussion.
Un document simple, parfois presque naïf, qui sert de support aux échanges :
quelles sont les pages importantes ? Que cherche l’utilisateur ? Que doit-il trouver en premier ?
Ces schémas basiques deviennent vite le terrain de dialogues. Souvent, le client n'a pas les réponses définitives, mais les questions sont posées.
C’est là que les idées se précisent, que les besoins se révèlent, que les priorités changent parfois.

Les rares fois où j’ai sauté cette étape, je l’ai toujours regretté.
Les maquettes arrivaient trop tôt, les décisions étaient floues, les retours interminables.
On se perd vite dans le “j’aime” ou “je n’aime pas”,
alors que tout devient plus simple quand on peut dire “cela a du sens” ou “cela répond à ce que nous avons défini”.
Je suis fermement convaincu qu'un design ne se défend pas par la beauté, mais par la cohérence.
Et cette cohérence, elle naît en amont, dans la structure, pas dans la couleur.

J’aime ces moments de préparation.
Ils sont calmes, constructifs, et ils posent les fondations d’un projet solide.
C’est un peu comme tracer les plans d’une maison avant de poser la première pierre :
on ne voit encore rien, mais on sait déjà où tout va se placer.

Un projet est prêt à être construit quand le client m’a donné assez de matière pour que je sente le sens derrière la forme.
Pas besoin de textes finis, ni d’images parfaites.
Mais il faut avoir échangé, réfléchi, remis en question certaines intuitions.
C’est plus difficile quand plusieurs voix se mêlent, quand chacun a sa vision, son envie, son “j’aimerais bien”.
Dans ces moments-là, il faut apprendre à distinguer ce qui est une préférence de ce qui est essentiel.
Et c’est tout l’enjeu de cette phase : construire un cadre commun avant de commencer à remplir.

Penser avant de construire, c’est créer un espace de clarté.
C’est accepter que la lenteur du départ soit le prix de la justesse de l’arrivée.
C’est faire le choix de la compréhension avant la production.
Et souvent, c’est ce qui fait la différence entre un site qui séduit un instant et un site qui dure.

Et si, avant de demander “à quoi ça va ressembler”, on se demandait d’abord “à quoi ça doit servir” ?